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Des vacances pour se découvrir et apprendre

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Noir-blanc : échec et… mat ?

Nous avons peu à peu, au fil des nécessités de coller à une soi-disante réalité, perdu l’essence même de ce qui faisait, de ce qui fait encore, la spécificité magique des vacances et des loisirs collectifs. Cette fuite du sens, laissé pour mort, qui s’évapore dans le quasi-abandon d’une réflexion de fond, au profit d’une démarche purement mercantile, nous devons l’arrêter. Il est intolérable que perdure cette perte des valeurs, cette entorse à une simplicité que d’aucuns jugent trop complexe. Aux Ceméa, nous partageons des valeurs, mais avec qui ? Ou plutôt : qui a envie de les partager avec nous ? À quoi servent-elles si elles ne font que se mordre la queue ? Ne laissons pas sournoisement se déliter tout un pan historique de nos principes sous prétexte que le changement est passé par là, que les enfants d’aujourd’hui seraient autres que ceux que nous avons été.

Aujourd’hui, Il est si facile d’obtenir l’agrément ou l’habilitation, ce fameux numéro qui ouvre les mannes des prestations et des bons CAF. Un programme, un planning, une plaquette « qui en jette », deux, trois adultes, un directeur (formé ou pas), une foule d’intervenants divers, de prestations et le tour est joué ! Tout un monde qui n’est pas le nôtre.

Halte à la neutralité Ouvrons les yeux, combien d’organisateurs ont encore un projet éducatif digne de ce nom ? Un projet réfléchi en concertation, élaboré au regard d’analyses pertinentes et objectives d’une situation sociale en souffrance, qui défend une politique éducative des vacances et des loisirs, sourde aux intérêts économiques et mettant en avant les rythmes et la vie collective. L’image des séjours s’est accrochée, au gré des ans, aux branches assassines de la concurrence. Une surenchère ridicule s’est imposée sur le marché des organisateurs, avec l’envie de proposer mieux que l’autre, au lieu d’affirmer des choix éducatifs spécifiques. Tout se ressemble aujourd’hui, le parfum des pareils flotte jusqu’à la nausée. Une neutralité fade a noyé petit à petit les velléités militantes de beaucoup. Il est plus que temps de mettre un terme à cette notion aberrante de prestataire, dans le secteur des centres de vacances et de loisirs. Tout ce qui touche à cette idée, où la vacuité des projets le dispute à l’absence d’objectifs, doit perdre le label « centres de vacances et de loisirs ». Il est plus que temps, de faire voler en éclats ces pseudo-centres faits de l’addition d’activités balancées côte à côte, sans lien réel. Puzzles aux pièces rapportées où l’enfant perd un peu de lui dans la valse insidieuse d’une course où « l’agir » s’efface petit à petit.

Revaloriser les liens Il est plus facile se confiner dans un silence pédagogique, rassurant qui glisse insensiblement vers l’effacement progressif du plaisir d’être avec les autres, dans une collectivité à sa dimension, au fil de ses humeurs, de ses désirs, de ses choix. Au profit de l’étalage indécent et superficiel d’une palette aux couleurs et motifs attirants.

Sachons revaloriser le lien qui se tisse dès le premier regard, dès la première heure, au hasard des choix, des chemins, des occasions multiples, à l’orée de ce que les enfants vont vivre. Ce pluriel qui nous touche dans chaque instant de chaque parcours de chaque enfant, à la découverte de sa journée, chaque jour autre, à lui et pas à l’autre, mais qui souvent sera commune à d’autres, et saura de temps en temps se passer de l’adulte. Cet imperceptible bonheur n’est-ce enfin que de l’illusion ? Ce qui se passe dans ce qui se tresse, ce qui se sent, se ressent, n’est-ce que du vent ? Cette conception a plus que jamais sa place dans une réalité de vie complexe, où il est toujours aussi difficile d’être soi sans être seul, d’être seul sans être esseulé. Même si la conscience collective a tendance à la trouver dépassée !

Appréhender l’individu dans sa totalité Une mode, ce courant de pensée qui met l’enfant, l’adolescent au cœur des préoccupations de l’adulte ? Une valeur intemporelle. Les enfants d’aujourd’hui sont les mêmes qu’hier. Clamer : « Rien ne marche, ils ne sont jamais contents, ils veulent autre chose, il leur faut des activités originales ! »est une fuite en avant ; l’original est dans la façon d’appréhender l’individu dans sa totalité et de ne pas le fondre dans un tout sans saveur, absorbant. Les différents partenaires du secteur « centres de vacances et de loisirs » ont voulu changer de cap, s’engager dans des propositions qu’ils maîtrisent mal ; sans chercher à comprendre pourquoi, et tiré des conclusions hâtives.

Je ne suis pas d’accord avec cette idée que les enfants de 1998 seraient si différents de ceux d’hier. C’est trop facile de s’appuyer sur leur refus pour expliquer les nôtres, trop facile de les accuser de tous les maux, sans rien faire pour comprendre et remonter à leur source.

Les adultes doivent comprendre la demande des jeunes Bien sûr, on affirme (et cela est sans doute vrai pour partie) que certains publics sont difficiles… à contenter. Mais a-t-on toujours lu et compris leur demande, ou voulu la comprendre ? Au risque de provoquer, je pense que ce sont souvent les équipes adultes qui sont difficiles. Parce qu’elles ont l’habitude de plaquer des réponses qui ne correspondent en rien à la réalité du public, mais bien à l’idée qu’elles se font de ce qu’il désirerait, parce qu’il est plus confortable d’enfiler des activités comme on enfile des perles. Plus besoin de se poser la question de savoir qui sont réellement les jeunes qu’on accueille. Des personnes avec des comportements actuels, des possibles, des peurs, des colères, des révoltes, des amours, des enthousiasmes, niés gravement chaque fois qu’il est question de les réduire à l’état de simple consommateurs ! Et si le monde bouge, si des rêves s’effondrent, les enfants dans leur violent silence, sont toujours aussi demandeurs de confort affectif, ont toujours autant soif de connaître, de savoir, de décider, de dire non, de comprendre, d’agir, d’être, et ceci au présent pour demain.

Tenir compte de la diversité des propositions Il y en a marre de ces menus pré-établis à l’avance qui ne tiennent aucun compte de ce qu’ils sont, un à un, mais seulement en bloc de ce qu’on voudrait qu’ils soient. Peu d’organisateurs ont l’objectif de leur permettre de devenir acteurs de leurs loisirs ; beaucoup en revanche se contentent de les gaver jusqu’à les étouffer et lorsqu’ils explosent, s’essuient la chemise en disant : « On a pourtant tout fait pour eux ». À leur place aussi sans doute. Nous avons fait fausse route. L’avenir des centres de vacances et de loisirs est avec les organisateurs dans la possibilité pour l’enfant et le jeune de choisir des vacances à leur mesure au sein d’une diversité de propositions, où le droit de ne rien faire aurait à nouveau toute sa place.

L’avenir réside aussi dans la conviction que nous aurons pour faire admettre et comprendre à « Jeunesse et Sports » que le label « centre de vacances et de loisirs » n’est pas un droit. C’est un projet qui se gagne, sur des idées avec des objectifs clairs et fouillés, le résultat d’une politique affirmée d’action éducative, un engagement constant dans la recherche d’une qualité, dans un rapport permanent entre théorie et pratique.

De cette réussite et seulement de celle-ci dépend le regain de sens profond qui définit les centres de vacances et de loisirs. Leur rayonnement doit toucher le plus grand nombre. Il y a du travail, des gens à convaincre, des histoires à écrire, des ardoises à effacer, des aventures à vivre, dans le quotidien des joutes oratoires et des actions de terrain. À nous d’oser rallumer dans leur regard ce petit quelque chose qui mettra le feu aux poudres, d’où naîtra la reconquête !

François Simon

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