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Des vacances pour se découvrir et apprendre

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L’éducation aux loisirs

Les quartiers Nord de Clermont Ferrand, banlieue. Une particularité : la rue ceinture le quartier. Dans ce paysage des plus ordinaires, une équipe a mis en place un centre de loisirs et construit un projet pédagogique autour de deux axes essentiels : l’éducation aux loisirs d’une part, les repères et les règles d’autres part.

L’éducation aux loisirs répond à la réalité des pratiques habituelles de la population du quartier.
Les structures de loisirs sont peu fréquentées. La population fortement immigrée a culturellement tendance à, parfois, se satisfaire d’une conception des loisirs où l’enfant est livré à lui-même. Certains d’entre eux vont seuls à l’école dès l’âge de quatre ans. L’absence de circulation automobile renforce cette habitude puisque, apparemment, il n’y a aucun danger réel.
Implanter dans un tel contexte un centre de loisirs au fonctionnement habituel, sinon classique, où les enfants doivent obligatoirement s’inscrire à l’avance pour venir eût été voué à l’échec. Il fallait, en amont, créer le besoin, l’envie, l’intérêt de fréquenter une structure de loisirs, ceci ne pouvant se faire que progressivement et avec des moyens adéquats. Bon nombre d’enfants et de familles ne venant pas spontanément au centre de loisirs, celui-ci tentera d’aller vers eux : certains animateurs ne seront donc pas au départ dans le centre, mais dehors.

Des animateurs hors du centre
Que tenteront-ils d’y faire ? Dans un premier temps, ce qu’ils peuvent et ce qui leur semble bien. D’une part, proposer aux enfants des activités dont on sait qu’elles remporteront du succès : aller à la patinoire, au cinéma, mais on sait que ce type d’activité peut placer les enfants dans une simple situation de consommation sans leur permettre pleinement de jouer et de vivre entre eux. D’autre part, proposer aux enfants de venir faire des activités dans la structure elle-même. Si cela sécurise les animateurs de revenir très vite dans les murs, cela peut en revanche apparaître trop contraignant pour des enfants qui ne peuvent pas se projeter dans le centre et donc déclencher chez eux un phénomène de fuite. Alors, face à ces deux risques, quelles solutions ont été tentées ?

Partir à l’aventure
Proposer aux enfants de jouer sur place, dehors, ou mieux encore de « partir à l’aventure ». Prendre un bus comme pour aller à la patinoire mais en fait pour aller dans un espace naturel pas trop éloigné, jouer, construire des cabanes… Des espaces, comme ça, pas trop loin, il y en a, oui, mais de l’autre côté de cette rue qui ceinture le quartier et encore au-delà d’une voie express. Bien que peu éloignés, ces espaces naturels de jeu sont devenus inaccessibles. L’expérience a prouvé que ce type de fonctionnement pouvait porter ses fruits. Les enfants en effet, méfiants au départ, se réinscrivent peu à peu à ces activités proposées à l’extérieur du centre et, progressivement, certains s’inscrivent même au centre de loisirs. Cette réussite s’explique également par le relais et le soutien assurés dans le quartier par d’autres types de personnel. Educateurs, assistants sociaux font aussi un travail d’information sur le centre de loisirs et d’incitation à sa fréquentation ; le centre peut ainsi progressivement tisser sa toile et la consolider.

Une souplesse de fonctionnement
On aboutit donc progressivement à un centre de loisirs où cohabitent deux types de fonctionnement : un centre dans lequel les enfants s’inscrivent et qu’ils fréquentent régulièrement, un centre où des activités sont proposées à l’extérieur aux enfants qui sont dans la rue. Certains enfants ont d’ailleurs très bien perçu ce double fonctionnement : inscrits au centre de manière régulière, ils demandent parfois à participer à une sortie qui est en train de s’organiser pour d’autres. On pourrait voir là un échec, les enfants ne s’intégrant finalement pas à la structure proposée. On peut y voir également un signe de réussite : les enfants se sont adaptés et profitent de la souplesse permise par la coexistence de ces deux types de fonctionnement. Cela complique sans doute un peu le travail des adultes mais le temps des loisirs ne peut véritablement en être un qu’avec cette souplesse-là.

Se donner et respecter des règles
L’autre travail qui se mène de pair avec les enfants qui ne fréquentent pas d’eux-mêmes ou sur incitation de leurs familles le centre de loisirs, est un travail sur les repères, les limites, les règles. Là également, il faut être au départ à la fois modeste et ambitieux. Si l’intention finale est bien d’amener les enfants à se donner et à respecter des règles leur permettant de vivre ensemble leurs loisirs et de respecter les adultes et les lieux, les objectifs intermédiaires seront eux beaucoup plus modestes : il s’agit simplement, mais ce simplement est fondamental, de permettre aux enfants de se donner et de respecter des règles qui assurent la « survie minimum » de la structure de loisirs.

L’acceptation des règles le fonctionnement du centre
Les premières règles sont donc très terre à terre : il s’agit de ne pas cracher, de ne pas se battre. Fixées par les enfants en fonction de leur réalité, ces deux règles de départ sont parfois complétées par d’autres en référence à des événements survenus par le passé dans le quartier : « On ne met pas le feu », « On ne sort pas les couteaux ». Au fur et à mesure de l’intégration et de la participation des enfants à la structure, les règles évoluent et ressemblent plus à celles qu’on peut rencontrer dans d’autres centres de loisirs : « On écoute parler les autres », « On range le matériel utilisé… » Cette acceptation de la ou des règle(s) rninimale(s) est fondamentale ; c’est elle qui conditionne le fonctionnement du centre avec un public considéré comme difficile.
Ces règles sont donc émises et discutées par les enfants, puis signées par eux, elles constituent dès lors un véritable contrat. Négocié entre les enfants et les adultes, ce contrat constitue un équilibre entre le minimum acceptable au départ par les enfants et les règles minimales sans lesquelles le centre ne pourrait pas fonctionner, d’où la notion de « survie minimale ». Lorsqu’il n’est pas respecté, ce contrat justifie parfois qu’un enfant soit refusé dans le centre pendant une durée donnée.
L’adhésion au contrat est la condition préalable à la poursuite de la fréquentation du centre par les enfants.

Alain Delbos
* D’après un entretien avec Véronique Camarero, directrice permanente OMJL de Clerrnont-Ferrand

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