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Des vacances pour se découvrir et apprendre

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Le sexe des anges

La sexualité enfantine n’est pas un « problème » ! C’est potentiellement un sujet, une question, un thème. C’est, banalement, une réalité, naturelle. Si effectivement il est nécessaire et urgent de parler de la sexualité enfantine, naturelle, fondatrice de l’individu, il faudra d’abord résoudre, ou tenter de le faire, la question du regard de l’adulte, qui lui, crée le problème. Et ce n’est pas simple !

La banalisation du « spectacle » de l’acte sexuel, du rapport sexuel, et de ses variantes vient perturber frontalement quelque chose qui nécessite une maturation longue, autant physiologique que psychologique et culturelle. Cette banalisation bouscule une approche qui ne devrait être que personnelle, à son propre rythme.

En ce qui concerne les temps de loisirs et de vacances collectives, les ACM, il est important d’interroger le regard et les pratiques des animateurs confrontés à une sexualité qu’au mieux ils ignorent, au pire ils rejettent, peut-être parce que la leur n’est pas encore stabilisée, acceptée ou vécue. Il faudra également interroger les pratiques de direction et voir comment les équipes anticipent la question, l’installent dans la vie du centre, comment elles informent, forment et encadrent les animateurs. Aujourd’hui, les enfants sont confrontés très tôt à des images clairement sexuelles, et à des pratiques commerciales qui les « sexualisent ». Il devient difficile pour une petite fille trop sollicitée par la mode, le maquillage, le mannequinat, l’hyperféminisation, de vivre sereinement, à son rythme, la découverte de son corps, des plaisirs qu’il peut lui procurer, en dehors de toute tentation de ressembler à, d’être femme sans l’être. Il n’est pas certain que cela soit sans conséquences sur la vie future des enfants.

La banalisation du « spectacle » de l’acte sexuel, du rapport sexuel et de ses variantes vient perturber frontalement quelque chose qui nécessite une maturation longue, autant physiologique que psychologique et culturelle. Cette banalisation bouscule une approche qui ne devrait être que personnelle, à son propre rythme. Elle est virtuelle, partagée

au sein de groupes de copains et de copines qui se trouvent de fait biaisés par le thème même de ce visionnage. Les équipes d’encadrement sont confrontées directement à cela. Quand elles ne participent pas à amplifier le phénomène en reproduisant au cours de veillées douteuses les pires débordements de la télé réalité, qui de fait, trouble un peu plus, culturellement, l’approche de la sexualité. Parler de la sexualité enfantine, avec des animateurs et des animatrices, c’est surtout rendre leur propre corps aux enfants, voire aux jeunes. C’est dé-moraliser le discours et le regard. C’est déculpabiliser.

Faire comprendre, informer et former

Non, un enfant qui se « touche » n’est pas un futur obsédé sexuel ou autre pervers. Non, les jeunes garçons qui mesurent leurs sexes à la lumière d’une lampe de poche et les comparent, ne sont pas de futurs homosexuels, et quand bien même d’ailleurs ! De même, les découvertes mutuelles des corps et des sexes n’induit pas une appétence future aux relations de groupes choisies ou non ! Il faut cesser d’urgence de regarder et d’analyser la sexualité enfantine avec des regards d’adultes fondés sur des pratiques d’adultes, ou de jeunes responsables de leur sexualité – faisons le pari que cela existe.

Est-il nécessaire de dire ici que la pédophilie est une perversion d’adulte ? Est-il nécessaire de dire que les violences sexuelles sont d’abord des violences aux personnes et devraient se traiter d’abord comme des violences. Ce qui est en jeu, c’est l’acception du corps de l’enfant. Ce qui va fonder en partie l’appropriation de son corps par l’enfant, c’est qu’il soit touché. Les mains et le corps de sa mère et de son père, les mains des enseignants, des copains. Etre touché, être en situation de confrontation corporelle fonde une personne et une personnalité. Cette relation, si elle est sexuée, de fait, n’est en rien sexuelle. Mais la peur de toucher les enfants, l’angoisse pour un animateur de prendre un enfant sur ses genoux, parce que ci ou parce que ça, sexualise ! L’angoisse est sexuelle, socialement ou culturellement sexuelle ! Premier « problème » ! Ensuite, et c’est tellement dommage de devoir le rappeler, la sexualité, le sexe et tout ce qui s’en rapproche n’est ni « sale » ni « mal ». Quand il s’agira de jeunes, dans une démarche certes différente, il faudra bien admettre que la relation sexuelle n’est pas interdite, y compris par la loi, entre deux adolescents, dans la mesure où elle est choisie et consentie. Nous nous trouvons dans la même démarche de diabolisation. Comme on parle toujours plus facilement de maltraitance que de bientraitance, on aborde trop souvent la sexualité, qui plus est enfantine, par le côté « problèmes  », violences, perversion. Ce qui d’ailleurs, bien souvent, contribue à créer le ou les problèmes. Il ne s’agit pas d’être naïf. La sexualité devrait s’apprendre, sereinement. Elle devrait pouvoir être parlée, sereinement également.Les temps de vacances et de loisirs sont des temps privilégiés, pour dédramatiser l’approche de la sexualité enfantine. Cela va nécessiter que les animateurs soient pour le moins informés, en dehors d’informations de types réglementaires. Que la sexualité soit comme d’autres approches, au coeur des projets pédagogiques des séjours. Et qu’enfin, les anges aient des sexes.

Alain Gheno

Les cahiers de l’Animation N°82

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