Utilisateur

9 + 6 =


Des vacances pour se découvrir et apprendre

You need to install or upgrade Flash Player to view this content, install or upgrade by clicking here.

Il n’y a pas de fatalité

Un texte de loi est passé au printemps. Très ambivalent, presque paradoxal. Il n’est pas certain que toutes les conséquences aient été perçues. Mais déjà, ou encore, il alimente un débat qui ne pose pas les véritables enjeux.

L’engagement éducatif fait beaucoup parler de lui en cette période d’après campagne d’été des séjours de vacances collectifs d’enfants et de jeunes. On a surtout entendu dire n’importe quoi. On assiste à des prises de positions radicales face à ce dispositif, quelques semaines après sa mise en œuvre. Entre les confusions syndicales qui le dénoncent et les chantres de la marchandisation des loisirs qui se réjouissent de son ouverture au privé pour le bonheur des citoyens, il est vrai qu’il est difficile de trouver le sens profond de ce dispositif.

Polémique, amalgames, débat syndical déplacé, vision techniciste de l’animation, confusion avec un petit boulot technique, vision d’adultes formatés par leur propre rapport à l’engagement, à la solidarité, adultes enfermés dans une conception monochrome et linéaire de l’activité humaine, tout y passe ! L’engagement éducatif est une belle idée dévoyée, comme le dit le directeur général des Ceméa dans le dernier numéro des cahiers.

Effectivement, le choix de situer l’engagement éducatif en dérogation au droit du travail lui fait perdre beaucoup de son sens, philosophique, celui de l’acte d’engagement solidaire au service de l’intérêt collectif. Du coup, la loi votée ne fait qu’améliorer un peu juridiquement la situation des animateurs occasionnels, comme le dit la Jeunesse au Plein Air. Le sens de cet engagement est, lui, absent du débat. Il nous faut sans cesse le rappeler, afin que les vraies questions de société qui sont sous jacentes, ne soient pas évacuées.

Nous affirmons, dans les orientations des Ceméa et ce depuis plus de dix ans, que : « L’engagement volontaire dans les CVL permet aux jeunes d’entrer dans la société des adultes à travers “un rite de passage” en vraie grandeur. » Il faut également que les CVL, espace social porteur de citoyenneté pour les participants, le soient aussi pour les encadrants en permettant à des non-professionnels de faire acte de solidarité et de citoyenneté en venant, sur leurs temps de loisirs, s’occuper d’autres plus jeunes qu’eux.

L’éducation est l’affaire de tous et il est important que des volontaires puissent continuer de s’engager dans cette action. Les professionnels qui les accueillent, doivent les accompagner et les encadrer, ce qui met en acte l’éducation populaire dans l’animation.

Ils y apportent une dimension pédagogique spécifique, un engagement et une dynamique remarquables, une qualité relationnelle et des compétences particulières.

[…] Ces jeunes prennent, dans un cadre défini et avec l’aide d’adultes, des responsabilités vraies. Cela contribue à leur insertion dans la société des adultes puisque celle-ci les reconnaît et leur fait confiance en leur confiant ses enfants ». Le discours majoritaire cet été d’une certaine presse régionale parlant des animateurs occasionnels montre bien la méconnaissance des enjeux de l’engagement volontaire dans l’animation. Il propage la confusion, la pensée unique libérale en n’abordant la question que par le rapport salarié, en dénonçant les petits salaires, les sous-smicards de l’animation du fait d’un dispositif bâti pour l’exploitation de la jeunesse.

Chacun n’entend que ce qui conforte sa propre vision des choses et parmi les analyses et les critiques, la parole des premiers intéressés est souvent occultée ou orientée.

On n’entend pas les animateurs et animatrices « occasionnels » dire en quoi cette expérience les a fait grandir, en quoi ils savent qu’il ne faut pas faire ça pour l’argent. Et pourtant, ils sont nombreux à dire que « là », ils ont le sentiment d’être utiles, de servir un projet social et éducatif. Certes, et c’est heureux, ils ne sont pas en arrivant tous des militants chevronnés de l’éducation populaire. Ils prennent conscience de leur contribution à une action éducative et sociale. Ils disent en quoi le fait de vivre ces expériences d’encadrement de séjours et de centres de loisirs dans un collectif d’adultes, souvent une vraie équipe, leur a permis de mesurer l’importance du relationnel, de l’échange, de la négociation, du respect des décisions prises ensemble.

Ils témoignent d’aventures réellement éducatives, pour eux comme pour les enfants qui ont participé aux séjours et autres centres de loisirs. Ils disent enfin qu’ils sont le plus souvent pleinement acteurs, pas simples exécutants, à condition que les adultes dirigeant et organisant ces accueils les prennent en compte et assument leurs responsabilités d’accompagnement. Vous avez dit éducation populaire ? Vous avez dit occasionnels ou volontaires ? Le volontariat éducatif dans l’animation, même si le dispositif qui le cadre juridiquement n’est pas satisfaisant, est un élément central de l’identité de l’éducation populaire dans le secteur des vacances collectives de mineurs. Il est le révélateur de sa bonne ou mauvaise santé.

Les positions extrêmes opposées, entre certains acteurs se réclamant de l’éducation populaire, des syndicats et les responsables des sociétés commerciales bénéficiant de l’ouverture de ce dispositif pourraient bien se rejoindre et porter ensemble la responsabilité de la fragilisation de ce dispositif d’engagement volontaire, voir son anéantissement. Ceux qui en doutent au sein du secteur associatif et syndical, risquent de devoir assumer la fin de l’éducation populaire dans l’animation, favorisant de fait l’action du secteur privé, basée sur la marchandisation des loisirs qui se réjouit, elle, de l’ouverture du dispositif de l’engagement éducatif. Les Ceméa continueront pour leur part à défendre le volontariat dans l’animation des CVL.

Vincent Chavaroche

image_pdfimage_print

Leave a Reply